Approuvé par le Conseil européen d’Amsterdam des 16 et 17 juin 1997, le traité d’Amsterdam a été signé le 2 octobre de la même année par les ministres des affaires étrangères des quinze pays membres qui constituaient l’Union européenne à l’époque. Comme tous les traités européens, son entrée en vigueur a été différée (1er mai 1999).
Le traité d’Amsterdam et les nombreuses critiques de l’opinion publique
En tant que document juridique, le traité d’Amsterdam a pour principal objectif de modifier certains règlements des traités constitutifs des Communautés européennes (traité de Paris et traité de Rome) et certains actes y afférents. Il ne se substitue pas aux traités précédents, mais s’y ajoute. Le traité d’Amsterdam a suscité de nombreuses critiques dans les opinions publiques des États membres. Pour beaucoup, ce traité a été le déclencheur d’une certaine médiatisation progressive des eurosceptiques qui atteindra son sommet avec le Brexit. Voici une synthèse des principales critiques qui ont été adressées à l’UE :
- Le traité d’Amsterdam est resté très consensuel, se refusant de résoudre l’un des plus grands problèmes en suspens de l’Union Européenne, à savoir l’adaptation des institutions à une Communauté de plus en plus élargie. Certaines institutions ont été pensées pour une union de moins de 10 États membres et ne sont donc pas outillées pour l’Europe des Quinze, sans parler de la future Union qui devra accueillir les pays d’Europe centrale et orientale ;
- Du point de vue plus pro-européen, le Traité d’Amsterdam n’a rien apporté pour l’objectif ultime de l’union politique des États européens. Les compétences communautaires dans des domaines tels que la politique étrangère, la sécurité commune ou la coopération policière et judiciaire n’ont pas été renforcées ;
- Aucun progrès n’a été fait pour combler le déficit démocratique de l’Union Européenne. Les négociations qui ont précédé le Traité d’Amsterdam ont continué à se fonder sur des concessions mutuelles entre les gouvernements et les États, sans participation des citoyens qui n’avaient pas non plus accès à une information transparente. Le rôle du Parlement européen, seule institution élue au niveau communautaire, n’a pas été suffisamment renforcé. Le texte du traité a une fois de plus eu recours à un langage technique compliqué, avec trois grandes parties, des annexes et 13 protocoles. Ni les citoyens, ni même les agents juridiques, politiques et économiques ne pouvaient sortir avec des conclusions fiables après la publication du texte du Traité d’Amsterdam, car une grande partie des dispositions étaient sujettes à interprétation.
Malgré toutes ces insuffisances, le traité d’Amsterdam a marqué un progrès sur la voie de l’Union européenne. Voyons à présent les principaux apports du traité.
Le traité d’Amsterdam : liberté, sécurité et justice
Le traité stipule sans équivoque que l’Union Européenne est fondée sur les principes de la liberté, de la démocratie, du respect des droits de l’Homme, des libertés fondamentales et de l’État de droit, principes communs aux États membres. En 1998, le Conseil européen de Cologne a décidé d’entamer l’élaboration d’une Charte des droits fondamentaux. Le traité a estimé que ces droits applicables au niveau de l’Union devaient être renforcés dans une Charte afin de mieux les faire connaître aux citoyens et mieux cadrer leur application. La Charte devait se fonder sur les traités communautaires, les conventions internationales telles que la Convention européenne des droits de l’Homme de 1950 et la Charte sociale européenne de 1989. Les traditions constitutionnelles communes aux États membres et les diverses déclarations du Parlement européen ont également été incluses dans l’élaboration de la Charte.
En matière de droits sociaux, le grand changement reste la signature du nouveau gouvernement britannique, présidé par Tony Blair, de la Charte sociale annexée au traité de Maastricht. Cette Charte des droits sociaux fondamentaux des travailleurs, communément appelée « Charte sociale européenne », a été incluse dans le traité d’Amsterdam. Il s’agit d’un instrument politique qui contient des obligations morales pour garantir le respect de certains droits sociaux. Ils sont liés au marché du travail, à la formation professionnelle, à l’égalité des chances et à l’environnement de travail. La Charte sociale stipule que le Conseil, après s’être conformé à différentes conditions, pourrait déterminer l’existence d’une violation grave et persistante des principes énoncés à l’article 6 par un État membre. Dans ce cas, le Conseil, à la majorité qualifiée, pourrait décider de suspendre certains des droits découlant du traité d’Amsterdam à l’État membre en question, y compris le droit de vote du représentant de ce gouvernement au Conseil Européen. Les sanctions adoptées par l’UE à l’encontre de l’Autriche en février 2000 en raison de l’accès du parti d’extrême droite de Jörg Haider au gouvernement de Vienne témoignent d’une attitude générale de défense des droits fondamentaux et de prévention contre les opinions politiques qui tentent de les contourner. En vertu du traité d’Amsterdam, un nouvel article (n° 13) a été inséré dans le traité européen afin de renforcer la garantie de non-discrimination prévue par les traités et de l’étendre aux autres cas précités.
Toutes les affaires relatives à la libre circulation des personnes, aux contrôles des frontières extérieures de l’Union, au droit d’asile, à l’immigration, à la protection des droits des ressortissants de pays tiers ainsi qu’à la coopération judiciaire en matière civile ont été « communautarisées » par le traité d’Amsterdam : elles relevaient désormais du cadre juridique de l’UE. A cet effet, l’accord et la convention de Schengen ont été inclus dans le traité. Le Royaume-Uni, l’Irlande et le Danemark sont volontairement restés à l’écart et ont donc conservé le droit d’exercer des contrôles sur les personnes se trouvant à leurs frontières. Rappelons que le Danemark avait adhéré à Schengen en 1996. La libre circulation des personnes rendant nécessaire la création de systèmes d’information à l’échelle européenne, les garanties de protection des données personnelles ont également été renforcées. L’insuffisance des réformes institutionnelles convenues a fait que le traité comportait une clause prévoyant la convocation d’une conférence intergouvernementale pour réformer les institutions de l’Union avant qu’un nouvel élargissement n’ait lieu.
Le traité d’Amsterdam : une position (à peine) plus forte pour le Parlement
Le Pouvoir législatif de l’UE
Dans le cadre de la procédure de codécision qui a été étendue aux 15 bases juridiques existantes en vertu du traité CE, le Parlement et le Conseil sont devenus co-législateurs et ont été mis sur un pied d’égalité. A l’exception de l’agriculture et de la politique de concurrence, la procédure de codécision s’applique à tous les domaines dans lesquels le Conseil a été autorisé à prendre des décisions à la majorité qualifiée. Dans quatre cas liés à l’identité culturelle et à la souveraineté politique, la procédure de codécision a été combinée avec l’exigence d’une décision à l’unanimité au Conseil. Les autres domaines législatifs où l’unanimité était requise n’étaient pas soumis à la codécision.
Le pouvoir de contrôle de l’UE
Outre le vote d’approbation de la Commission en tant qu’organe, le Parlement a également voté pour l’approbation anticipée du président de la future Commission.
L’élection et le statut des députés de l’UE
En ce qui concerne la procédure d’élection du Parlement au suffrage universel direct, le pouvoir de la Communauté d’adopter des principes communs a été ajouté au pouvoir existant d’adopter une procédure uniforme. Une base juridique permettant l’adoption d’un statut unique pour les députés européens a été incluse dans le même article. Toutefois, aucune disposition ne permettait encore de prendre des mesures pour développer des partis politiques au niveau européen comme c’est le cas aujourd’hui.
Une coopération plus étroite entre les pays de l’UE
Pour la première fois, un traité européen prévoyait des dispositions générales permettant à certains États membres, sous certaines conditions, de tirer parti d’institutions communes pour organiser une coopération plus étroite. Cette option s’ajoutait à la coopération renforcée couverte par des dispositions spécifiques, telles que l’Union économique et monétaire, la création de l’espace de liberté, de sécurité et de justice et l’intégration des dispositions Schengen. Les conditions que toute coopération renforcée entre États membres doit remplir et les procédures de décision prévues ont été élaborées de manière à ce que ce nouveau facteur du processus d’intégration reste exceptionnel et, en tout état de cause, ne puisse être utilisé que pour aller plus loin dans l’intégration et non pour faire marche arrière. Cette disposition a été vigoureusement contestée par les eurosceptiques qui y ont vu une restriction dans la liberté de penser et une fuite en avant. Le traité d’Amsterdam a par ailleurs supprimé des traités européens toutes les dispositions qui étaient devenues caduques ou obsolètes, tout en veillant à ce que cela n’affecte pas les effets juridiques qui en découlaient de manière rétrospective. Le traité d’Amsterdam a également renuméroté les articles du traité constitutif de l’Union Européenne. Pour des raisons juridiques et politiques, le traité a été signé et soumis à ratification sous la forme d’amendements aux traités existants.