L’Union Européenne est fondée sur une série de traités juridiques signés entre ses différents États membres. Le premier traité, qui a institué la Communauté économique européenne (CEE), a été signé à Rome en 1957. Cinq traités ont ensuite suivi, modifiant chacun les dispositions du précédent tout en apportant des nouveautés pour servir l’objectif ultime de l’intégration économique et de l’union politique. Il s’agit notamment de l’Acte unique européen ou AUE en 1986, du traité de Maastricht signé en 1992, du traité d’Amsterdam de 1997, du traité de Nice signé en 2001 puis du traité de Lisbonne (2007). Rappelons qu’en 2003, l’Union Européenne avait élaboré un projet de traité constitutionnel destiné à remplacer tous les traités existants. Ce document unique était censé régir le fonctionnement de l’UE pour mettre un terme à la pluralité des traités et à la multiplicité des sources. Toutefois, à la suite des votes négatifs lors des référendums en France et aux Pays-Bas en 2005, le projet de traité constitutionnel a été abandonné, et le traité de Lisbonne l’a donc remplacé dans la foulée. Ce dernier a lui aussi connu un vote défavorable en Irlande en 2008, avant d’être ratifié dans ce même pays à l’occasion d’un second référendum. Le traité de Lisbonne, dernier traité de l’UE en date, est entré en vigueur en décembre 2009.
La CECA et le traité de Paris, signé en 1951
Signé le 18 avril 1951 et entré en vigueur le 26 juillet 1952, le traité de Paris traduit la nouvelle politique européenne au lendemain de la Deuxième Guerre Mondiale et que l’on peut résumer par le slogan scandé par les peuples dès 1945 : « Plus jamais ça ». Le traité instituant la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA) a été donc été paraphé par la Belgique, la France, l’Italie, la République fédérale d’Allemagne (Allemagne de l’Ouest ou RDA), le Luxembourg et les Pays-Bas. Le Royaume-Uni a préféré donner la priorité à son Commonwealth, mais changera vite d’avis en constant la belle croissance économique enregistrée par les pays membres. Rappelons que le Général de Gaulle était contre l’adhésion de Londres qu’il soupçonnait de connivence avec les États-Unis d’Amérique, la puissance « rivale » après la chute de l’Allemagne nazie. Le traité de Paris qui a constitué la CECA est resté en vigueur pendant 50 ans.
Le traité de Rome, signé en 1957
C’est le traité de Rome qui a institué la Communauté économique européenne (CEE), considérée aujourd’hui comme le parent direct de l’Union Européenne telle que nous la connaissons aujourd’hui. Pour cette raison, le traité de Rome est sans doute le plus connu des traités de l’Union Européenne. La CEE qui en a résulté a mis en place un marché commun, jetant les bases de la viabilité de la communauté européenne. Au lendemain du traité de Rome, les États membres pouvaient se targuer d’avoir accordé à leurs peuples respectifs la liberté de circulation des biens, des services, des capitaux et des personnes. Une union douanière entre les États fondateurs a également été décidée à l’issue des négociations qui se sont déroulées tout au long des années 1950. Le traité de Rome a donc été signé dans la Ville Éternelle en mars 1957 par la France, la République Fédérale d’Allemagne (Allemagne de l’Ouest ou RFA), l’Italie, les Pays-Bas, la Belgique et le Luxembourg. Les pays fondateurs ont affirmé leur engagement à jeter les bases d’une union toujours plus étroite entre les peuples d’Europe, comme on peut le lire en préambule du texte du traité de Rome.
Le traité a mis en place une organisation de jure qui a assuré l’établissement et le gouvernement de la CEE. Quatre institutions ont été créées à cette fin : une Commission, un Conseil des ministres, une Assemblée parlementaire (qui s’est ensuite transformée en Parlement européen) et une Cour de justice européenne. Au départ, seuls les six membres fondateurs s’y sont inscrits. Mais au fil des ans, de plus en plus de nations ont intégré ces institutions par le biais des élargissements successifs de l’Union Européenne. Aujourd’hui, l’UE compte 28 États membres… mais en comptera bientôt 27 après l’activation du Brexit. L’objectif du traité de Rome était de transformer le commerce et l’industrie dans la CEE, mais aussi d’œuvrer pour une Europe unifiée. On peut donc dire que le bilan est plutôt nuancé, notamment sur le plan politique. Aujourd’hui, le traité de Rome, qui a fait l’objet de plusieurs amendements, est désigné sous l’appellation de « traité sur le fonctionnement de l’Union européenne » ou TFUE.
L’Acte unique européen (AUE), signé en 1986
L’Acte unique européen (AUE) a été la première tentative des États membres de modifier les dispositions du Traité de Rome. Il a eu pour principal effet de fixer un délai pour la création d’un marché unique complet à l’horizon 1992, une échéance jugée ambitieuse mais réalisable par les dirigeants de l’époque. L’AUE a d’abord cherché à lever les nombreuses mesures restrictives qui compliquaient la tâche des investisseurs de la Communauté européenne dès lors qu’ils tentaient d’étendre leurs activités à un autre pays membre.
Ces difficultés, qui résistaient à la liberté de circulation des personnes, des capitaux et des services garantie par le Traité de Rome signé trois décennies plus tôt, ont fait l’objet de grands débats au sein de l’Union, certains pays craignant une fuite des capitaux, à la fois financiers et humains, vers les pays les moins stricts sur le plan fiscal. L’Acte unique européen a également poursuivi l’objectif ultime de l’intégration européenne en facilitant les mécanismes d’adoption des lois, en renforçant le Parlement européen et en affichant clairement la volonté des États membres d’aboutir à une politique étrangère européenne cohérente qui garantirait au Vieux-Continent une place de choix dans l’échiquier politique mondial.
Le traité de Maastricht, signé en 1992
Bien qu’il représente le premier effort controversé et massivement contesté de la Communauté Européenne, le traité de Maastricht a permis de progresser sur deux grands processus clés, tout en rapprochant un peu plus l’Europe de son objectif d’intégration politique. Le traité de Maastricht a permis d’aller encore plus loin dans l’élargissement des responsabilités politiques et contraignantes de la Communauté Européenne (CE) tout en élargissant le champ des domaines de compétences concernés par l’intégration des pays européens. Le traité de Maastricht a également modifié les dispositions du traité de Rome tout en faisant progresser considérablement l’agenda défini dans le cadre de l’Acte unique européen. C’est aussi la première fois que le concept de l’Union politique européenne (UPE) a été détaillé et traité sur le plan juridique, notamment dans les domaines de la politique sociale mais aussi et surtout dans la sphère monétaire.
Le traité de Maastricht a également introduit un nouveau modèle communautaire fondé sur trois « piliers » qui couvrent les domaines hautement stratégiques des relations économiques, de la politique étrangère, de la justice et des affaires intérieures. C’est à l’issue du traité de Maastricht que les premières contestations sur l’atteinte à la souveraineté des Etats ont pris de l’ampleur, notamment de la part des partis d’extrême droite et des formations conservatrices. Le traité a donc donné au Parlement européen une plus grande influence dans la prise de décision par le biais de la procédure de codécision. Il a aussi développé le concept de citoyenneté européenne et a établi le principe de subsidiarité. Plus symboliquement, il a officiellement changé le nom de la Communauté européenne qui s’appelait désormais l’Union européenne, abrégée en UE.
Le traité d’Amsterdam, signé en 1997
Le traité d’Amsterdam a été, dans une large mesure, un exercice visant à régler les derniers détails du traité de Maastricht signé cinq plus tôt. En 1997, les dirigeants des pays membres de l’UE, mais pas seulement, se sont donc retrouvés une nouvelle fois aux Pays-Bas pour discuter des mesures à adopter pour accélérer l’intégration politique et maintenir l’objectif affiché d’aboutir à une monnaie unique à l’horizon 2000. Le résultat le plus médiatisé du traité d’Amsterdam a été la mise en place du cadre juridique, économique et politique pour l’adhésion imminente de dix nouveaux Etats membres, principalement d’anciens pays communistes d’Europe de l’Est. Cette intégration n’était pas simplement une initiative pour dynamiser l’Union. C’était aussi, quelque part, une victoire idéologique qui consacrait une nouvelle fois la victoire du modèle occidental et qui accentuait l’isolation du géant russe, en proie à des difficultés économiques et à une crise politique.
Le traité d’Amsterdam a intégré la Convention de Schengen dans le droit de l’Union Européenne, créant ainsi des frontières ouvertes entre 12 des États membres. Il a également élargi le rôle de la politique étrangère et de sécurité commune de l’Union en créant un Haut représentant chargé d’assumer la responsabilité globale des affaires étrangères de l’Union. L’autre nouveauté phare du traité d’Amsterdam concerne le système de vote dans l’union, puisque l’essentiel des décisions devaient désormais être prises par le vote à la majorité qualifiée (VMQ)… un concept qui suscitera, quelques années plus tard, de vives contestations de la part des pays les plus peuplés d’Europe.
Le traité de Nice, signé en 2001
A peine 4 ans après le sommet d’Amsterdam, les dirigeants européens se sont entretenus à Nice avec un constat commun : l’Union Européenne est un franc succès sur le plan économique, mais rien ou presque n’avait été fait pour aller plus loin dans l’intégration politique européenne. Si les plus optimistes espéraient que le projet fédéraliste allait enfin être mis sur la table des négociations, les Eurosceptiques s’attendaient plutôt à un abandon de l’intégration politique pour se diriger plutôt vers une Europe des Nations, dans laquelle les pouvoir régaliens resteraient aux mains des gouvernements nationaux.
Le traité de Nice était donc une tentative de trouver une nouvelle approche viable pour faire évoluer la machine européenne tout en consolidant les acquis économiques. Une grande partie du texte du Traité portait logiquement sur la réforme du processus décisionnel de l’UE. Il a étendu le vote à la majorité qualifiée au Conseil de l’UE, modifié la manière dont le président de la Commission devait être élu, donné au président le pouvoir de licencier des commissaires individuels et fixé des limites quant au nombre de commissaires et de députés européens de chaque pays. Enfin, le traité de Nice a « promis » la tenue d’une autre conférence intergouvernementale pour rédiger une constitution de l’Union Européenne. Mais la suite des événements ne s’est pas vraiment déroulée comme les Europhiles l’espéraient…
Le traité de Lisbonne, signé en 2007
C’est le dernier traité en date de l’Union Européenne. Le traité de Lisbonne a été rédigé pour remplacer la Constitution européenne rejetée par la France (54,67% des voix pour le « Non ») et les Pays-Bas (un record de 61,6% de voix pour le « Non »). Le traité a clarifié le rôle des institutions et organes européens, explicité les objectifs à terme de l’Union Européenne pour rassurer les européistes qui ne sont pas prêts à faire des concessions sur les pouvoirs régaliens des nations et renforcé les mécanismes juridiques de l’UE. Le traité de Lisbonne a modifié la manière dont les décisions de l’UE sont prises et a aboli la structure en « piliers » définie par le traité de Maastricht. Il a élargi les domaines dans lesquels la Commission peut proposer des actes législatifs, fait du vote à la majorité qualifiée la méthode de vote par défaut au Conseil et créé deux postes de haut niveau : un haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité et un président permanent de l’UE, tout en accordant à l’Union une indépendance juridique accrue pour conclure de nouveaux accords. Le traité de Lisbonne a également introduit la Charte des droits fondamentaux dans le droit européen pour fixer des normes en matière de droits de l’Homme pour tous les pays de l’UE. Des pays comme la Pologne, le Royaume-Uni et la République tchèque ont toutefois choisi de ne pas adhérer à cette Charte. L’Irlande et le Royaume-Uni ont également obtenu le droit de refuser toute décision européenne dans les domaines de la justice et des affaires intérieures. Suite au rejet par l’Irlande du Traité de Lisbonne en 2008, des protocoles ont été ajoutés pour garantir la neutralité militaire. Enfin, le traité de Lisbonne a ajouté un article (n°50) qui détaille la procédure à adopter si un État membre souhaite mettre fin à son adhésion à l’Union Européenne. C’est cet article qui encadre le Brexit.