Sobriété. C’est le maître-mot des symboles et du graphisme adoptés par l’Union Européenne et ses différentes institutions. Cinq symboles ont fait l’histoire de l’Union Européenne : le célèbre drapeau européen, qui compte 12 étoiles dorées sur fond bleu, la date du 9 mai qui célèbre chaque année la « Journée de L’Europe et de l’hymne européen », l’euro qui est la monnaie de l’Union et enfin la devise « Unis dans la diversité ». L’hymne européen (Hymne ou Ode à la joie) est une adaptation du dernier mouvement de la 9e Symphonie de Beethoven. Le drapeau a été utilisé par la première fois par le Conseil de l’Europe en 1972 et la Journée de l’Europe commémore la proposition faite le 9 mai 1950 par le ministre français des Affaires étrangères, Robert Schuman, pour une Europe unie comme condition indispensable au maintien de relations pacifiques. Cette proposition, connue sous le nom de « déclaration Schuman », est la pierre angulaire de l’Union européenne telle que nous la connaissons aujourd’hui.
Le drapeau européen et le mystère des 12 étoiles
Comme son homologue américain, le drapeau européen affiche une belle notoriété. On l’a tous vu flotter quelque part. Ce cercle de douze étoiles dorées sur fond bleu a dépassé le simple artefact politique pour s’ancrer définitivement dans la culture populaire. Mais pourquoi 12 étoiles ? On serait tenté de penser aux États membres, mais l’explication ne tient pas. L’Union Européen compte 28 pays, et la liste ne va pas tarder à s’élargir… sans que le drapeau n’accueille de nouvelles étoiles. L’histoire du drapeau européen commence dans les années 1950. En 1955, l’UE n’existait que sous le nom de la « Communauté européenne du charbon et de l’acier », une entente à vocation exclusivement économique, dans le contexte de l’après-guerre, avec six pays : l’Allemagne de l’Ouest (RFA), l’Italie, la France, ainsi que les trois pays du Benelux, à savoir la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg.
Cependant, il y avait aussi une autre organisation avec un peu plus de pays membres : il s’agit du Conseil de l’Europe. Cette organisation a été fondée quelques années auparavant dans le but de promouvoir les droits de l’Homme et la culture européenne dans son ensemble. Ce Conseil de l’Europe, à la recherche d’un symbole fort pour son organisation, a choisi un cercle de douze étoiles dorées sur un fond bleu. Par la suite, le Conseil de l’Europe a également invité d’autres institutions européennes à utiliser ce symbole. En 1985, le drapeau a finalement été adopté par tous les chefs d’État et de gouvernement comme emblème officiel de la Communauté européenne. En plus du drapeau européen, les autres institutions de l’UE ont également leurs propres symboles et emblèmes, qui sont généralement des variantes avec les mêmes couleurs et le même esprit que le drapeau européen. Mais pourquoi douze étoiles ? Dans diverses traditions, européennes ou pas d’ailleurs, ce nombre est assimilé à la perfection, à la plénitude, à l’unité et à l’équilibre. Douze mois font un an, il y a douze apôtres dans la tradition chrétienne, il y a douze heures par jour et douze heures par nuit, etc. En somme, le cercle des étoiles dorées est censé représenter la solidarité et l’harmonie entre les peuples d’Europe.
L’hymne européen ou l’ode universelle à la joie
La mélodie de l’hymne européen est tirée de la Neuvième Symphonie de Ludwig van Beethoven, composée et interprétée pour la première fois en 1823. Dans le quatrième et dernier mouvement de cette symphonie, Beethoven met en musique l’ « Hymne à la joie » de Friedrich von Schiller de 1785, un poème né de la vision idéaliste de Schiller selon laquelle tous les Hommes sont (ou seront) frères… une vision partagée par Beethoven. Lorsqu’en 1972, le Conseil de l’Europe adopta l’Hymne à la joie de Beethoven comme hymne, le célèbre chef d’orchestre Herbert von Karajan fut chargé de composer trois versions instrumentales de l’hymne européen : une pour piano solo, une pour les instruments à vent et une dernière pour l’orchestre symphonique. Sans paroles, dans le langage universel de la musique, l’hymne est l’expression des valeurs idéalistes de liberté, de paix et de solidarité que défend l’Europe. Le fait de contourner les paroles est également une manière d’échapper à la querelle linguistique et aux nombreuses traductions pour contenter toutes les nations qui composent l’Union Européenne. Ce n’est qu’en 1985 que le morceau a été adopté comme hymne officiel de l’Union européenne par les chefs d’État et de gouvernement de l’Union sur proposition du Parlement européen. Il n’est pas destiné à remplacer les hymnes nationaux des États membres, mais à symboliser les valeurs partagées, dans l’esprit de l’unité dans la diversité.
La mélodie de l’ « Ode à la joie » est simple, presque élémentaire, avec une musicalité accessible à tous. Le principal souci de Beethoven était de trouver le parfait équilibre entre l’unité et la variété, pour rendre l’air facilement mémorisable sans pour autant lasser. Dans les passages commémorant les valeurs de vérité, de liberté, de fraternité universelle et de bonheur universel, l’Homme sort vainqueur de toutes ses oppressions physiques et morales. Tout au long de sa vie, et même dans ses périodes les plus heureuses, Beethoven a été impacté par les tourments de sa surdité, ses difficultés financières, le malheur dans l’amour et les agonies de la vie. Les idéaux kantiens de la culture des Lumières de l’époque, qui ont été au centre des connaissances et de la vie intérieure de Beethoven, sont ici mis en pratique et sublimés par l’entrelacement de la musique et de la poésie. C’est précisément cette exhortation à la fraternité et à l’amitié, à l’amour et à la paix, dont l’Ode est un symbole très figuré, qui explique pourquoi le Conseil de l’Europe, puis les Communautés européennes, ont décidé d’en faire l’hymne officiel qui dépasse les frontières des nations et les différences entre peuples.
« Unis dans la diversité » : la devise du compromis européen
Le préambule de l’article I-8 du traité constitutionnel, qui contient l’expression « Unis dans la diversité », fournit des indications utiles pour l’interprétation de la devise qui compte deux mots-clés : l’ « unité » et la « diversité ». Le slogan fait référence à l’hétérogénéité des pays de l’Europe sur les plans de l’histoire, de la culture, de la langue, etc., que l’Union vient unir selon les valeurs universelles des Droits de l’Homme, mais aussi du respect de la loi. Le passage du préambule consacré à la devise de l’UE affirme que les peuples d’Europe, fiers de leur identité et de leurs histoires nationales, sont déterminés à surmonter les anciennes différences et à s’unir toujours plus étroitement pour façonner un destin pacifique et prospère.
Les formulations exprimant l’unité sont omniprésentes dans les traités européens, mais aussi, plus largement, dans les traités de toutes les organisations transnationales. Elles rappellent la formule habituelle de l’ « Union sans cesse plus étroite » contenue dans le préambule du traité sur l’Union européenne. La voie vers des relations toujours plus étroites est progressive et, comme l’explique déjà la déclaration de Schuman du 9 mai 1950, elle repose sur des réalisations concrètes qui créent un véritable sentiment de solidarité. L’unité, cependant, n’est pas une fin en soi. Elle a plutôt un objectif bien précis : « façonner le destin commun ». Mais le concept de diversité y est aussi clairement exprimé, et renvoie au sentiment de fierté des peuples pour leur identité et leur histoire.
Pour bien saisir l’essence de la devise, il faut mettre l’accent sur les valeurs communes aux États membres sur lesquelles l’Union européenne est fondée. L’article I-2 du traité constitutionnel en mentionne six : le respect de la dignité humaine, de la liberté, de la démocratie, de l’égalité, de l’État de droit et des droits de l’Homme. Ces valeurs caractérisent la société européenne qui aspire aux valeurs du pluralisme dans toutes ses formes, de la tolérance, de la justice, de la solidarité de la non-discrimination. L’article I-2 fournit d’autres indications explicites de la devise. Il est essentiel de trouver un équilibre entre l’unité et la diversité, car trop d’unité conduirait au danger d’une homogénéisation et donc de la destruction des identités nationales. Trop de diversité peut facilement empêcher la convergence des objectifs et, à terme, menacer les fondements mêmes de la construction d’une Europe unie. Jack Lang a bien saisi les deux termes avec sa remarque « la diversité n’est pas division (…), la différence n’est pas indifférence, l’union n’est pas uniformité ». La recherche de l’unité des valeurs fondamentales, d’une unité avec différenciation simultanée, semble donc importante. A la fin des années 1920, le philosophe et homme politique espagnol José Ortega y Gasset invente une métaphore devenue célèbre : « L’Europe est comme un essaim : elle compte plusieurs abeilles mais un seul vol ».